Borne de recharge solaire pour voiture électrique : fonctionnement, puissance et exemples d’installations

Borne de recharge solaire pour voiture électrique : fonctionnement, puissance et exemples d’installations

Imagine brancher votre voiture électrique sur une borne… qui tire son énergie directement du soleil. Pas du réseau, pas (ou très peu) d’électricité nucléaire ou fossile en arrière-plan, juste vos panneaux qui chargent silencieusement votre batterie. Utopie verte ? Pas du tout. Les bornes de recharge solaire commencent à se multiplier en France, aussi bien chez les particuliers que dans les entreprises.

Sur le terrain, je vois souvent deux réactions : les uns fantasment sur « l’autonomie totale », les autres pensent que c’est forcément hors de prix ou trop complexe. La réalité est entre les deux. Une borne de recharge solaire peut être une excellente idée… à condition de bien comprendre son fonctionnement, la question de la puissance, et les limites du système.

Qu’est-ce qu’une borne de recharge solaire, exactement ?

Une borne de recharge solaire n’est pas un « objet magique » unique. C’est en fait la combinaison de trois éléments :

  • des panneaux solaires (généralement photovoltaïques) ;
  • un système électrique (onduleur, protections, parfois batteries) ;
  • une borne de recharge pour véhicule électrique (wallbox, borne AC ou DC).

Selon les projets, ces trois éléments peuvent être :

  • intégrés dans une structure unique (abri de voiture solaire avec borne intégrée) ;
  • ou répartis : panneaux sur le toit, onduleur au garage, borne fixée au mur.

Dans tous les cas, le principe reste le même : les panneaux transforment l’énergie solaire en électricité, qui est ensuite utilisée pour recharger le véhicule, soit directement, soit en passant par le réseau.

Fonctionnement : autoconsommation, réseau, batteries… qui fait quoi ?

Il existe trois grandes architectures de bornes solaires pour voiture électrique. Le choix dépend de votre budget, de vos objectifs (écologiques, économiques, autonomie) et de votre profil de recharge.

Les bornes solaires en autoconsommation raccordées au réseau

C’est le cas le plus fréquent pour un particulier en France.

Le schéma est simple :

  • vos panneaux alimentent d’abord vos consommations électriques (maison + borne) ;
  • en cas de surplus, il est injecté sur le réseau (avec ou sans contrat de vente) ;
  • si le soleil ne suffit pas, le réseau complète.

Vu du véhicule, la borne fonctionne comme une wallbox classique. Ce qui change, c’est la source de l’énergie qui transite. En pleine journée d’été, une grande partie de la recharge peut être couverte par le solaire. En plein hiver le soir, ce sera essentiellement le réseau.

Avantages :

  • Fiabilité maximale : jamais de panne de recharge si le soleil est absent.
  • Installation plus simple qu’un système 100 % autonome.
  • Retour sur investissement optimisé si vous utilisez bien votre production solaire.

Inconvénient principal : vous restez dépendant du réseau pour une partie des recharges, surtout si vous rentrez tard et rechargez la nuit.

Les bornes solaires avec stockage sur batterie

Ici, on ajoute un acteur clé : la batterie stationnaire (lithium, parfois plomb sur certains anciens systèmes). Le principe :

  • les panneaux chargent d’abord la batterie domestique ;
  • la borne de recharge puise dans cette batterie ;
  • si la batterie est vide, le réseau prend le relais.

On est sur une logique d’optimisation : stocker le surplus solaire de la journée pour l’utiliser le soir sur la voiture. C’est intéressant si :

  • vous êtes souvent absent la journée (panneaux qui produisent, mais personne pour consommer) ;
  • vous rechargez principalement le soir ou la nuit ;
  • vous voulez maximiser votre taux d’autoconsommation.

Côté coût, en revanche, la batterie fait vite grimper la facture. On y reviendra avec des ordres de grandeur un peu plus bas.

Les bornes de recharge solaires 100 % autonomes (off-grid)

C’est la version « cabane au fond des bois » : aucune connexion au réseau.

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On la retrouve plutôt sur :

  • des sites isolés (gîtes en montagne, parkings ruraux, exploitations agricoles éloignées) ;
  • des bornes publiques solaires temporaires (événements, salons en plein air) ;
  • des carports solaires autonomes avec gros stockage.

Dans ce cas, toute l’énergie vient du soleil et de la batterie stationnaire. Cela implique :

  • une installation surdimensionnée en panneaux et en batteries pour absorber les journées nuageuses ;
  • une puissance de charge limitée pour ne pas vider le système en quelques heures ;
  • une gestion fine de la consommation.

C’est réalisable, mais on est sur des projets spécifiques, rarement sur une maison de lotissement en banlieue avec une Zoé ou une Model 3.

Quelle puissance pour une borne de recharge solaire ?

La question de la puissance est centrale : c’est elle qui détermine à la fois le confort d’usage (temps de recharge) et la taille de l’installation solaire nécessaire.

Puissance de la borne vs puissance des panneaux : deux mondes à ne pas confondre

On mélange souvent :

  • la puissance de la borne : 3,7 kW, 7,4 kW, 11 kW, 22 kW… ;
  • la puissance des panneaux solaires installés : 3 kWc, 6 kWc, 9 kWc…

Exemple concret : vous installez une borne 7,4 kW couplée à 6 kWc de panneaux. En plein soleil, la production instantanée sera peut-être de 4 à 5 kW. Le reste (2 à 3 kW) viendra du réseau. Et c’est parfaitement normal.

Autrement dit : votre borne peut techniquement charger vite, mais la part « 100 % solaire » de cette charge dépendra de l’ensoleillement et de la taille de votre champ PV.

Temps de recharge typiques avec une borne solaire

Pour vous donner des ordres de grandeur (sur une voiture avec batterie de 50 kWh utile) :

  • Prise renforcée 3,7 kW : environ 14–15 h pour une recharge complète.
  • Borne 7,4 kW (monophasé) : 7–8 h.
  • Borne 11 kW (triphasé) : 5–6 h.

Maintenant, ramenons ça au solaire. Imaginons :

  • Installation de 6 kWc bien orientée en France métropolitaine ;
  • En été, on peut espérer autour de 30 kWh/jour de production moyenne.

Avec ces 30 kWh, vous rechargez grosso modo :

  • environ 60 % d’une batterie de 50 kWh ;
  • soit, pour une conso moyenne de 15 kWh/100 km, à peu près 200 km d’autonomie.

On retrouve un ordre de grandeur souvent constaté sur le terrain : un système de 3 à 6 kWc couvre très bien les « petits » trajets quotidiens, mais ne suffira pas à recharger en un claquement de doigts une grosse batterie plusieurs fois par semaine.

Exemple concret de dimensionnement pour un foyer

Prenons le cas d’un couple habitant près de Lyon, maison individuelle, une voiture électrique principale, 15 000 km/an, consommation de 16 kWh/100 km.

Leur conso annuelle liée à la voiture sera d’environ :

15 000 km × 16 kWh/100 km = 2 400 kWh/an.

Une installation solaire de 3 kWc bien exposée produit autour de 3 300 kWh/an dans cette région. On voit immédiatement que sur le papier, 3 kWc suffisent pour « alimenter » les kilomètres de la voiture… si l’on parle en bilan annuel.

Mais dans la vraie vie :

  • les jours sans soleil, il faudra le réseau ;
  • si vous rechargez toujours la nuit, sans batterie stationnaire, le solaire couvrira surtout les autres usages de la maison, pas la voiture ;
  • en été, vous serez largement excédentaire, en hiver un peu juste.

C’est pour cela que la borne de recharge solaire s’envisage souvent dans un projet global d’autoconsommation : on dimensionne d’abord pour les besoins de la maison + de la voiture, puis on optimise les habitudes de recharge.

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Borne solaire et gestion intelligente de la recharge

Le vrai saut qualitatif, ces dernières années, c’est l’arrivée des bornes intelligentes capables d’adapter la puissance de charge en fonction de la production solaire instantanée.

Concrètement :

  • un compteur de consommation/production mesure en temps réel ce qui se passe sur votre installation ;
  • la borne module sa puissance pour coller au surplus solaire disponible ;
  • résultat : vous rechargez majoritairement quand le soleil est là, sans surcharger le réseau domestique.

C’est particulièrement utile pour éviter les appels de puissance trop élevés (et les déclenchements de disjoncteur) quand toute la maison tourne en même temps que la voiture.

Sur certains projets chez des artisans ou des PME, j’ai vu cette approche faire une vraie différence : pas besoin de surdimensionner l’abonnement électrique, la borne s’adapte aux contraintes du site.

Exemples d’installations réelles

Pour sortir de la théorie, voici trois cas que j’ai rencontrés ou qui ressemblent à des configurations fréquentes en France.

1. Pavillon périurbain avec carport solaire

Un couple en région toulousaine, voiture électrique principale (40 kWh), maison déjà équipée de 6 kWc de panneaux sur toiture. Ils ont ajouté un carport solaire de 3 kWc dédié principalement à la voiture, avec une borne 7,4 kW pilotée par la production solaire.

Résultat sur un an :

  • en été, la quasi-totalité des recharges se fait en journée, quasi 100 % solaire ;
  • en hiver, environ 30–40 % seulement des kWh de recharge proviennent du solaire, le reste du réseau ;
  • taux global d’autoconsommation de l’installation passé de 35 % à près de 60 % grâce à la voiture.

2. PME avec parking équipé de bornes solaires

Une petite entreprise de logistique en Bourgogne a installé un abri de parking solaire de 36 kWc avec plusieurs bornes de 22 kW AC. Les véhicules utilitaires électriques sont rechargeés principalement en journée.

Ce type de projet répond à plusieurs objectifs :

  • réduire la facture énergétique de la flotte ;
  • améliorer l’image environnementale de l’entreprise ;
  • offrir des points de charge aux salariés.

En pratique, la puissance instantanée des panneaux ne suffit pas toujours à alimenter plusieurs charges à 22 kW en même temps, donc le réseau complète. Mais sur l’année, la part solaire dans l’énergie consommée par la flotte dépasse souvent 50 %.

3. Gîte rural avec borne de recharge solaire semi-autonome

Dans un gîte en Lozère, non raccordé au gaz et avec un réseau électrique fragile, le propriétaire a mis en place 9 kWc de panneaux, un stockage batterie de 20 kWh, et une borne 7,4 kW pour les clients en voiture électrique.

La borne est paramétrée pour :

  • prioriser l’usage du surplus solaire + batterie ;
  • limiter la puissance de recharge quand la batterie stationnaire est basse ;
  • prendre un complément du réseau si nécessaire, mais de façon lissée.

L’objectif n’est pas de garantir une charge ultra-rapide, mais d’offrir une solution de recharge cohérente avec le projet écologique du lieu, sans faire exploser l’abonnement électrique.

Combien ça coûte ? Ordres de grandeur

Les prix varient selon la configuration, mais pour se faire une idée (fourchettes indicatives, TTC, hors aides spécifiques) :

  • Borne de recharge seule 7,4 kW : 800 à 1 500 € installée (chez un particulier).
  • Installation solaire 3 kWc en autoconsommation : 5 000 à 7 000 € installés.
  • Installation solaire 6 kWc : 8 000 à 11 000 € en moyenne.
  • Batterie stationnaire 10 kWh : 6 000 à 10 000 € selon la technologie.
  • Carport solaire 3–6 kWc + borne : souvent entre 10 000 et 20 000 € selon la structure et les options.
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Pour un particulier, le combo le plus fréquent reste :

  • 3 à 6 kWc de panneaux en autoconsommation ;
  • une borne 7,4 kW ;
  • sans batterie stationnaire, ou avec une petite capacité.

Ce type de configuration permet déjà de couvrir une part non négligeable des kilomètres à l’électricité solaire, pour un investissement qui reste comparable à une installation photovoltaïque classique + borne.

Aides et incitations en France

La bonne nouvelle, c’est que plusieurs dispositifs peuvent alléger la facture :

  • Prime à l’autoconsommation pour les installations photovoltaïques jusqu’à 100 kWc (montant dégressif en fonction de la puissance). Elle s’ajoute au revenu de la vente éventuelle du surplus.
  • TVA réduite à 10 % sur les installations photovoltaïques ≤ 3 kWc intégrées au bâti, sous certaines conditions.
  • Crédit d’impôt / aides locales pour l’installation de bornes de recharge (programme Advenir pour les particuliers, copropriétés et entreprises, régulièrement mis à jour).
  • Éventuelles aides régionales pour les carports solaires ou projets exemplaires (variable selon les territoires).

Les règles évoluent régulièrement, donc un passage par les textes en vigueur (et un installateur à jour de ces sujets) est indispensable au moment de chiffrer votre projet.

Points de vigilance avant de se lancer

Quelques questions utiles à se poser avant de signer un devis :

  • Quand rechargez-vous vraiment votre voiture ? Si c’est surtout la nuit, sans batterie, la part de solaire direct restera limitée.
  • Votre puissance de raccordement est-elle suffisante ? Une borne 7,4 kW sur un abonnement 6 kVA peut être problématique si vous utilisez beaucoup d’appareils en même temps.
  • Avez-vous de la place disponible (toiture, carport, ombrière de parking) bien orientée et peu ombragée ?
  • Souhaitez-vous privilégier le bilan économique ou l’impact écologique maximal ? Une installation surdimensionnée en panneaux et batteries est très « verte », mais le retour financier sera plus long.
  • Le matériel choisi est-il évolutif ? Possible d’ajouter des panneaux, une batterie, ou de mettre à jour la borne pour de la gestion intelligente de l’énergie ?

Sur le terrain, les projets les plus réussis sont ceux où l’on ne pense pas la borne de recharge solaire comme un « gadget à côté », mais comme une pièce d’un puzzle plus large : isolation, chauffage, usages électriques, mobilité quotidienne.

Vers une mobilité vraiment solaire ?

Associer véhicule électrique et photovoltaïque, ce n’est pas simplement « verdir » sa borne de recharge. C’est changer de regard sur l’énergie : on ne s’intéresse plus seulement aux kilowattheures qu’on consomme, mais aussi à ceux qu’on produit.

Est-ce que votre voiture sera alimentée à 100 % par le soleil toute l’année ? Probablement pas, surtout en hiver. Mais est-ce qu’une borne de recharge solaire peut couvrir une grande partie de vos trajets quotidiens, réduire votre facture, et vous rendre un peu moins dépendant des fluctuations du réseau et des prix de l’électricité ? Oui, clairement.

La clé, comme souvent avec le solaire, c’est l’adéquation entre le projet et la réalité de vos usages. Une installation bien pensée, même modeste, fera plus pour la transition énergétique qu’un grand carport surdimensionné mais mal utilisé.

Et entre nous, il y a quand même un petit plaisir à brancher sa voiture un matin ensoleillé, en se disant que l’énergie qui entrera dans la batterie dans les prochaines heures vient directement du toit au-dessus de votre tête. Sans facture supplémentaire, sans fumée, juste le soleil, quelques mètres de câbles et un peu d’électronique bien réglée.